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Les lettres de cachet

de premiers arguments pour s’opposer à un projet urbanistique

•  • Vendredi 11/11/2011 • 0 commentaires • Version imprimable

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De gustibus et coloribus non est disputandum. Et pourtant, c’est un des premiers arguments pour s’opposer à un projet urbanistique.

Entendons les trompes du bon goût à la mélodie passéiste. Mais les notes ne seraient-elles pas fausses ? Sur quels critères esthétiques, mes concitoyens et leurs élus se fondent-ils pour refuser leur « imprimatur ».

Il y a toujours des arguments objectifs pour critiquer un projet. Des éléments techniques, des volumes, des implantations, peuvent être critiqués et parfois à juste titre. Mais bien souvent, l’opposition à ces projets ne se fonde ni sur ces arguments, ni sur l’envie d’améliorer le bien commun. Il s’agit plus simplement d’une opposition au changement. Que l’on ne vienne pas déranger ma quiétude, ma vue, heurter mes conceptions esthétiques. Et les critiques seront d’autant plus virulentes, les oppositions plus fermes, s’il s’agit d’habitations à caractère social.

Tout est bon pour justifier son rejet. Dans nos villages, la préservation du caractère rural est la première chose qui est avancée par les opposants, quand bien même ils auraient oublié le parfum des fenaisons ou la douceur dela terre. Dela ruralité, ils n’ont retenu que l’absence de voisins et une nature domestiquée. « Il faut savoir qu’une prairie fleurie ne fleurit que pendant quelques semaines, se plaint un riverain. En dehors de cette période, il s’agit de pailles plus ou moins couchées et encombrées de branches, mauvaises herbes, chardons, orties… » lisais-je dans un article consacré à un projet d’habitations sociales entourées de prairies fleuries. Témoignage d’une méconnaissance de la prairie fleurie et du goût pour ce qui est tiré au cordeau.

La est également un biais bien commode. Ne pensez-vous pas que nos petites routes seront si vite saturées ? Et alors. Peut-être que plus vite seront-elles bloquées, plus vite nous prendrons nos vélos ou les transports en commun ? Par ailleurs, est-ce un argument pertinent à moyen ou long terme ? Allons-nous vers un avenir avec ou sans voiture ? Et si la pertinence à court terme est avérée, il existe aussi des moyens pour améliorer la situation.

Une position très « naturaliste » conduit également à s’opposer à un projet. La proximité d’une zone naturelle ou la présence d’une espèce protégée sont des données objectives, mais dont l’interprétation peut être très vite subjective.

Les nuisances sonores, olfactives sont régulièrement évoquées. Il est possible de les maîtriser.

Restent les goûts et les couleurs dont il ne faut pas disputer (discuter). Mais en tous les cas, pas de corons disait dernièrement une riveraine d’un lotissement aux maisons à deux ou trois façades. Nos villages ont du cachet. Cela vaudrait-il dire qu’ils ont du chic, de l’originalité comme le définit le dictionnaire. De l’originalité, si rarement, avec des alignements de fermettes qui se prennent pour des manoirs. Du chic, mais qu’est-ce ? Du clinquant, du modèle de magazines. Dans un dossier récent, certains se disaient que les constructions ne dureraient pas longtemps. Ha, si vous faisiez comme tel ou tel lotissement soupiraient-ils. Oui mais les budgets ne sont certainement pas les mêmes. Seraient-ils prêts à voir leurs taxes augmentées pour offrir des immeubles de standing « à nos pauvres » ? Et puis, il y a aussi de « toutes les cougnes » dans le cœur de nos villages. Arrêtons de nous faire du cinéma.

Cela veut-il dire qu’il faut tout accepter ? Loin de là… Mais l’analyse ne peut pas faire l’impasse sur le côté humain et social d’un projet.

Au diable, les lettres de cachet.

(source)

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