Mots-clés : Urbanisme, Aménagement du territoire
« La modification du paysage est aussi l’affaire des petits détails quotidiens »
Ces principes définis à l’article 113 du Cwatupe moribond se retrouveront, parait-il, dans un de ses avatars à paraitre prochainement au journal officiel. Selon d’éminents experts, respecter, structurer ou recomposer le paysage est finalement tout et son contraire et l’argumentation, la motivation en termes légaux, devra soutenir, justifier les choix posés.
Des gens importants, autour d’une table, entourés de conseillers bien sérieux, discutant du sexe des anges et des lignes de force du paysage, ont rédigé le contenu de ces décrets. D’autres, après la publication de nombreux textes, se lancent dans l’interprétation de ces commandements selon le camp qu’ils défendent. De leur côté, des citoyens se moquent de ces arguties et considèrent que ces lignes doivent rester de force, parce qu’un paysage ne se meut pas, sauf peut-être certaines dunes ou déserts.
Tout cela est extrêmement important, excessivement peut-être, parce que le paysage est partie intégrante de notre vie. Il faut pouvoir « objectiver », verbe fourre-tout, sa situation pour définir son évolution. Il faut l’appréhender « scientifiquement » si tant est que cela soit réellement possible, mais il ne faut pas négliger ses aspects culturel et sensuel.
Les paysages ont évolué de tout temps, et pas seulement du fait de l’être humain. Les incendies de forêt, les inondations, l’évolution naturelle des landes façonnent l’aspect de nos environnements.
L’homme y a mis sa patte, certainement dans nos régions. Un lotissement, une usine, une porcherie vont être directement perçus comme une « atteinte » au paysage. Mais des pratiques culturales peuvent également influencer le ressenti. Des champs de maïs ne sont pas des prairies. En Ardenne, la transformation de bosquets de feuillus en pessières a eu un impact non négligeable sur la représentation culturelle que nous nous faisons de cette région. Pour les générations actuelles, elle est une terre à épicéas alors que cette évolution est somme toute récente.
Mais il nous semble qu’il y a deux écueils sur lesquels ne devraient pas échouer nos réflexions :
- D’une part, limiter le paysage à une portion de territoire. Le paysage n’est pas uniquement cette étendue libre de champs et de prés à la sortie du village. C’est le village également, ses rues et ses ruelles, ses jardins.
- D’autre part, il serait très réducteur de ne considérer que les projets de « grande ampleur » comme facteur de modification. Tout ce qui se trouve dans le paysage le modifie, l’altère ou l’améliore.
Une responsabilité personnelle
L’habitude de clore nos propriétés avec des palissades crée des rues où l’on se sent enfermé, mal accueilli, alors qu’une haie sauvage ou un vieux mur ne donnerait peut-être pas la même sensation. Nos jardins sont meublés de jeux et jouets de couleurs vives, de chalets suisses. à chacun d’imaginer l’impact visuel. L’état de la voirie joue également un rôle. La présence de déchets, de poubelles trop pleines ou de panneaux publicitaires influencent la perception, comme le ferait aussi un environnement « trop aseptisé » où aucun brin d’herbe ne dépasse.
Les voitures peuvent être bannies de la place, les chalets suisses démontés, les papiers balayés et les jeux de jardin terminer leur existence au parc à conteneurs. Mais ils ont aussi comme particularité, par leur constance, d’avoir une influence sur le paysage et d’être de la responsabilité de tout un chacun.
La modification du paysage n’est finalement pas qu’affaire de « grands projets », mais aussi de petits détails quotidiens. Il serait bon de se le rappeler.